Les droits fondamentaux
des fillettes et des jeunes femmes en Europe:
questions et défis pour le 21e siècle
Introduction - quelques questions importantes
La 'condition' des jeunes femmes vivant dans nombre de régions
d'Europe semble relever du paradoxe. D'un côté, on
célèbre le renforcement de leur autonomie et de leur
indépendance, attestée au premier chef par l'élévation
de leur niveau d'instruction (lequel, dans certains pays, dépasse
à présent celui des garçons, sauf au niveau
des études supérieures, ce qui amène à
se demander avec inquiétude comment réagir face aux
résultats décevants des garçons!). D'un autre
côté, on continue de juger préoccupantes la
maternité 'précoce' et l'augmentation des cas de comportement
délinquant et de troubles psychosociaux (troubles de l'alimentation,
notamment), en particulier dans certaines régions d'Europe
occidentale.
Dans un récent débat radiophonique consacré
à l'utilité que continuait d'avoir la Commission sur
l'égalité des chances au Royaume-Uni, j'ai émis
l'opinion que, si ses campagnes avaient été un 'succès'
complet, les faits observés auprès des jeunes auraient
conduit à des constatations tout à fait nettes. En
fait, le tableau est contradictoire. Il ne fait aucun doute que
les jeunes femmes manifestent un sentiment d'égalité
avec les hommes bien plus profond que par le passé, ce qui
dénote une division du travail selon le sexe moins nette
que celle naguère en vigueur. Cela dit, on voit se dessiner
une tendance inverse à une division du travail selon le sexe
plus marquée, notamment parmi les groupes les plus marginalisés
de la population adolescente. Cette nouvelle division n'a pas grand-chose
à voir avec la mutualité et la réciprocité
qui avaient cours dans le passé, même si elles s'exprimaient
à travers une forte subordination des femmes : l'homme en
tant que soutien de famille et la femme investie de responsabilités
domestiques. Elle traduit plutôt le renoncement total des
jeunes hommes à toute responsabilité en ce qui concerne
la relation, les tâches domestiques et l'éducation
des enfants, l'accroissement corrélatif du fardeau, tant
domestique qu'économique, des jeunes femmes (de la classe
ouvrière). C'est ce que j'ai appelé 'self-centred
masculinity and trapped motherhood' (masculinité égocentrique
et maternité piégée), dans le cadre desquelles
les frontières entre les sexes pourraient bien être
encore plus marquées qu'auparavant. Le discours sur l'égalité
entre les sexes néglige souvent ce contexte, qui est pourtant
profondément (et de façon inquiétante) ancré
dans l'approche de certains groupes de jeunes et devrait tempérer
l'ardeur à célébrer les progrès que
la majorité des jeunes ont pu accomplir.
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