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Les jeunes : un danger ?

La Commission jeunesse de la Ligue des droits de l’Homme de Belgique s’étonne et s’inquiète des différentes mesures adoptées qui, sous l’objectif apparent du maintien de l’ordre public et de la sécurité des citoyens intègrent également des dispositifs menaçant les libertés des jeunes. Elle a organisé un débat sur ce thème le 30 juin 2011, rue des Boulets 22 à Bruxelles. Parmi les mesures qu’elle dénonce, la Commission retient particulièrement celles qui ont un caractère attentatoire au respect de la vie privée, à la liberté de circulation, à l’accès à la culture et aux loisirs :
- les couvre-feux et l’interdiction de regroupement imposés aux jeunes dans de plus en plus de communes ;
- l’appel au repérage de la « radicalisation des jeunes » lancé par la ministre de l’Intérieur Annemie Turtelboom en janvier 2011 ;
- le programme VIP -« Very Irritating Police »- développé sur la côte depuis avril dernier ;
- les mesures proposées récemment, à nouveau par Annemie Turtelboom, pour gérer les parcs récréatifs et en interdire l’accès à différents jeunes ;

À la veille des vacances scolaires d’été, la Commission jeunesse de la Ligue des droits de l’Homme craint une recrudescence de ces mesures « anti-jeunes ». Durant les prochaines semaines, des jeunes de tout âge et de toute origine vont « envahir » les jardins publics, les parcs de loisirs, les plages et autres lieux de détente. Seul(e)s, en couple, en groupe ou en grappe, ils feront résonner ces lieux de leurs éclats : des rires, de la colère, du bruit, des insultes, des disputes ou des démonstrations d’amitié. Faudra-t-il pour autant percevoir ces jeunes comme une menace à la quiétude des « adultes » et multiplier les moyens pour les cantonner dans leur quartier ?

Sans pour autant tomber dans l’angélisme et prétendre que les jeunes ne se rendent jamais coupables d’infractions ou d’incivilités, la Commission jeunesse tient à attirer l’attention des médias sur un point central : la systématisation des politiques de suspicion et de contrôle à l’égard des jeunes dans l’espace public posent la question de la place que l’on veut bien accorder à ces derniers dans notre société démocratique. Une société ne peut pas prôner le jeunisme (performances intellectuelle ou physique, mode, culture pop,…) et peiner à intégrer réellement les moins de 25 ans dans son espace public, osciller entre l’envie de considérer les jeunes comme un facteur d’avenir et une source de danger.

L’image du jeune inévitablement perturbateur, l’amalgame entre jeunesse et délinquance se retrouvent trop fréquemment dans les médias et sont entretenus par les décisions prises au niveau politique. C’est pourquoi la Commission jeunesse tient à rappeler aux représentants du monde politique et aux acteurs des médias que leur travail participe à la vision qu’ont les adultes de la jeunesse. Dès lors, cet été, lorsqu’il s’agira de réaliser des produits médiatiques avec une actualité concernant des jeunes, ou d’adopter l’une ou l’autre mesure d’urgence, il sera utile de se demander si ils ne véhiculent pas une image clichée, faussée et artificiellement insécurisante des jeunes. Un jeune a le droit de s’exprimer et de ne pas être jugé d’emblée.


« La Commission jeunesse de la Ligue des Droits de l’Homme belge est un lieu de réflexion et d’action qui traite des problèmes liés à tout ce qui touche spécifiquement aux jeunes (aide et protection de la jeunesse, enseignement, prise en charge des jeunes, etc.). Cette Commission aide donc à déterminer les prises de position officielles de la Ligue dans ces matières. Elle joue un rôle aussi bien de vigilance que d’information ou d’action dont le but est, d’une part, de s’assurer que les instruments nationaux et internationaux de protection de la jeunesse soient respectés et, d’autre part, d’œuvrer pour l’amélioration constante du sort réservé aux mineurs. »



Maj :06/08/2011
Auteur : ficemea