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Fédération internationale des Ceméa
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Les pays africains francophones et leurs colonies de vacances
Dans ce texte, Marc Genève, secrétaire général de la Ficeméa rappelle que la plupart des états de l’Afrique Occidentale (AOF) et de l’Afrique Equatoriale françaises (AEF) devenus indépendants, ont gardé certaines des institutions installées par la France avant 1960. C’est le cas, en particulier, des colonies de vacances.
Installées par la France dans plusieurs en Afrique avant 1960, les colonies de vacances ont été maintenues dans la plupart des pays d’Afrique francophone. Mais les raisons qui avaient conduit à la création des colonies de vacances en Europe ne se retrouvaient pas en Afrique et de ce fait ces colonies ont eu des finalités différentes. Elles ont évolué selon des chemins très différents depuis cette époque. Un héritage commun mais des évolutions très différentes En France, l’histoire des colonies de vacances est liée à celle de l’école publique obligatoire et gratuite mise en place par les lois Ferry. Dans une France agricole, cette école s’est construite avec un temps important de « vacances estivales », qui devait permettre aux enfants de cette France rurale de participer aux travaux des champs. par la suite, l’exode rural, l’industrialisation et la création de banlieues ouvrière ont favorisé le désœuvrement des enfants et des jeunes. Parallèlement cette population scolaire s’est trouvée confrontée à des risques sanitaires qui ont incité des institutions privées, puis l’Etat à se préoccuper de cette période de vacances et à proposer le projet de colonies de vacances. Un lien naturel existait donc fait entre école et colonies de vacances, y compris en terme d’encadrement beaucoup d’enseignants étant soit moniteurs, directeurs ou économes de ces colonies. Rien de comparable dans l’Afrique des années 60. Le besoin de main d’œuvre rurale pouvait aussi faire partie des réalités, mais le problème majeure était l’accès à l’école et l’acceptation même de l’école dans les projets de la plupart des sociétés africaines où l’école n’était pas un fait de société. Dans l’ensemble des nouveaux pays indépendants, le faible taux de scolarisation des enfants, moins de 50%, était la caractéristique principale. Les colonies de vacances ne s’inscrivaient ni dans un besoin de loisirs occupationnels, ni dans une démarche populaire répondant à un réel besoin d’épanouissement social, sanitaire, culturel ou économique des enfants africains. Elles apparaissaient plutôt comme une proposition « élitiste » qui renforçait le privilège de ceux qui pouvait déjà accéder à l’école alors que l’important était d’abord de permettre à ces enfants d’accéder à l’école et de réduire le taux d’analphabétisme. Mais, aucun de ces pays ne s’est engagé dans une stratégie d’éducation autre que celle du modèle scolaire traditionnel européen. Seuls quelques pays ont tenté des expériences avec l’utilisation de la télévision comme outils d’enseignements (Cote d’ivoire, Niger…). Un seul pays, l’Algérie a utilisé les colonies de vacances comme outil d’accès au développement, en particulier pour inciter les familles à utiliser l’eau courante dans les habitations. Enfin certains pays, le Sénégal, le Mali, le Burkina, le Benin, ont utilisé des méthodes issues de la pédagogie des colonies de vacances pour initier la création de « Clos d’enfants », c’est-à-dire des lieux d’éducation où la pédagogie mise en œuvre se rapprochait de celle utilisée dans les centres de vacances : participation aux modalités d’accès au savoir, brassage social, implication d’adultes non enseignants, expérimentation par le faire et le jeu, travail collectif… De ce fait la plupart des pays ont poursuivis l’action initiale en lui donnant une coloration locale, mais peu ont conceptualisé une approche politique nationale centrée sur des enjeux de développement et d’accès au savoir dont les colonies de vacances auraient pu être des outils. Aujourd’hui : une situation très diversifiée, avec quelques points communs. La diversité des pratiques nationales est la règle de cette activité. Chacun est maitre de sa législation, de ses pratiques et de ses formations comme en Europe. Les institutions transnationales comme l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), la Conférence des Ministres de la Jeunesse et des Sports (CONFEJES) ou l’UNICEF ne sont pas intervenues pour optimiser et impulser une dynamique éducative à ces pratiques de colonies de vacances. Cette diversité est certes une source de richesses, puisqu’elle autorise toutes sortes d’expérimentations. Mais comme aucune structure, modalité, instance ne permet de les échanger ou de les confronter, il n’est pas possible d’en tirer les éléments porteurs d’avenir ou au contraire les tendances lourdes. Toutefois en regardant quelques expériences et rapports fournis par les associations membres de la Fédération Internationale des Centres d’Entrainement aux Méthodes d’Education Active (FICEMEA), il est possible non pas de faire une typologie des pratiques, mais de faire ressortir quelques points communs : Ce qui ressort en premier lieu c’est la faiblesse des effectifs d’enfants concernés par les colonies de vacances : quelques centaines dans la plupart des pays, avec un pic de 15000 au Sénégal suivi par un autre de 1300 en Cote d’Ivoire. La conséquence de cette faiblesse est l’absence de recherches et de collectes d’informations sur les colonies. Cette absence d’informations (Manque de sources, de statistiques, de rapports de stage, de réflexions pédagogiques…) explique en partie le manque d’intérêt de la part des chercheurs et des étudiants africains, ou internationaux de faire des colonies de vacances africaines un objet d’étude. Ce qui frappe ensuite, c’est l’absence d’échanges, d’une part entre les administrations nationales en charge de ces colonies dans les différents pays, et d’autre part entre les personnels impliqués dans l’encadrement des activités ou dans la formation des « encadrants ». Compte tenu de la faiblesse des effectifs concernés, cette situation n’est pas porteuse de réflexion prospective et novatrice. Le troisième point à souligner, est l’effort important réalisé pour « africaniser » les démarches pédagogiques en introduisant des thématiques ou des modalités de fonctionnement originales et adaptées aux situations africaines. En 2012, la Cote d’Ivoire a proposé une thématique nationale avec comme slogan « Réconcilions nous pour un développement durable », alors que de son coté le Sénégal proposait "La lutte contre la maltraitance des enfants". La recherche de ces spécificités s’est accompagnée aussi d’une volonté de dépasser les modèles européens et d’aller en chercher d’autres en Asie ou en Amérique. Mais, l’abandon des inspirations sanitaires et sociales des pays européens et la préférence donnée à l’organisation d’activités spécifiques ont renforcé le caractère élitiste de ces colonies les réservant à des « élèves méritants » au détriment d’une politique de loisirs éducatifs pour le plus grand nombre. Ces colonies proposent un large choix de d’activités, dont : des activités sportives, au Gabon et en Cote d’Ivoire, des activités culturelles avec « contes africains, arts du masque » ou musique, théâtre…, des séjours à l’étranger en particulier vers des pays comme le Cap-Vert, la Gambie, le Maroc, la Mauritanie, le Portugal, l’Espagne, le Ghana, l’Afrique du Sud ou Dubaï, avec une dimension linguistique importante, surtout pour apprendre l’anglais (par exemple les colonies du « club des amis d’ACCRA » qui organise des séjours pour les jeunes ivoiriens au Ghana), des activités liées à la protection de l’environnement, du développement durable souvent liées à des activités scientifiques, que nous retrouvons pratiquement dans tous les pays…. Elles offrent aux jeunes concernés une opportunité pour partir, être mobile, découvrir de nouveaux lieux et s’initier à de nouvelles activités. Autre point commun, ces colonies, sauf à Madagascar où depuis 2009 les colonies ne sont plus soutenues par l’Etat, elles ont un cout par colon relativement plus élevé qu’en Europe, ce qui renforce l’aspect élitiste de leur fonction sociale. De plus en plus, les collectivités locales semblent vouloir fournir des aides financières aux parents et assurent surtout les investissements pour les lieux d’hébergement. En Cote d’Ivoire par exemple, la Mairie du Plateau est, avec 149 enfants, l’organisation qui a fait partir le plus de colons en colonies de vacances . Partout, les Etats ont jusqu’ici organisé ces colonies en construisant une réglementation spécifique, comme celles de la Cote d’Ivoire ou du Gabon. Celle-ci prévoit une procédure de type « agrément » pour les futurs organisateurs qui doivent respecter un ensemble de règles et d’obligations, comme celle d’avoir un personnel formé dans le cadre de formations validées par l’Etat. Cette exigence est importante pour ces pays où la plupart des colonies sont organisées par la société civile (associations d’éducation ou associations religieuses) ou par le monde économique (entreprises comme Total, Shell, Mines de l’Ogoué), ou ministères (Finances, Défense)… Cette réglementation propose ainsi un cadre de travail indicatif et sécurisant à tous les organisateurs occasionnels. Dernier point commun, l’étanchéité des colonies organisées pour les jeunes européens et celles organisées pour les jeunes africains. De nombreux organisateurs européens de colonies de vacances proposent des séjours en Afrique pour découvrir les grands parcs, les espaces sauvages, les animaux et la vie en brousse que ce soit au Swaziland, en pays zoulou ou en Afrique du Sud. Pratiquement aucun de ces organisateurs ne partage son savoir, ses équipes d’encadrement et/ou son public avec les organisateurs locaux, ou fait tout simplement appel à ses compétences. Seuls les Ceméa de Madagascar co- organisent depuis de nombreuses années une colonie mixant enfants et encadrement malgache et français au plus grand bonheur des uns et des autres. Tous font ainsi une découverte humaine et interculturelle à cette occasion. Ce bref tour d’horizon est loin d’être exhaustif. Ce tour d’horizon est un premier défrichage qui s’appuie sur des informations très parcellaires et incomplètes. Il devrait en appeler d’autres, provoquer des réactions de la part des différents organisateurs de colonies de vacances et susciter des vocations chez les chercheurs et étudiants africains pour approfondir le rôle et l’intérêt que peuvent représenter les colonies de vacances pour ces pays. De son coté la Ficemea qui a proposé à l’OIF et la CONFEJES de réfléchir sur l’utilisation d’une application du « passeport francophone » appliqué aux colonies de vacances. approfondi sa proposition. Ce passeport francophone des directeurs et animateurs de colonies de vacances en facilitant la mobilité intra pays francophones permettrait aux « encadrants » des colonies de vacances de circuler facilement dans l’espace francophone. Cette mobilité pourrait favoriser l’optimisation de l’utilisation des compétences, la circulation des résultats, la généralisation des expériences signifiantes et contribuerait à faire tomber certaines des préjugés projetés sur « l’autre » pays. Marc Geneve Secrétaire Général de la Ficeméa Dossier à compléter avec : GROS PLAN SUR LES COLONIES DE VACANCES AFRICAINES JPA N° 447 COTE D’IVOIRE : BILAN DES COLONIES DE VACANCES DE L’ANNÉE 2012- Sénégal : perspectives pour les colonies de vacances 2012 GABON : BILAN DES COLONIES DE VACANCES DE L’ANNÉE 2012 Histoire des colonies de vacances (Françaises) de 1860 à nos jours Madagascar : Bilan des colonies de vacances de l’année 2012 Les colonies de vacances : un concept dépassé MARC GENEVE Juillet 2013 Maj :28/08/2013
Auteur : ficemea Auteur : marc geneve |