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Gros plan sur les inégalités dans les économies émergentes
Les pays émergents jouent dans l’économie mondiale un rôle grandissant qui est appelé à croître dans les années à venir. Il est donc important de prendre en compte les économies de ces pays dans toute évaluation globale de l’évolution des inégalités dans le monde.

Toujours plus d’inégalité : Pourquoi les écarts de revenus se creusent © OCDE 2012

Ce texte examine les schémas des inégalités et les problèmes qui s’y rattachent dans les principales économies émergentes. Il commence par un bref aperçu de ces schémas dans une sélection de pays, avant d’examiner plus en détail les principaux facteurs à l’origine des inégalités, puis d’exposer dans la section suivante les principales caractéristiques et difficultés des cadres institutionnels sous-jacents. Il énonce enfin quelques-uns des grands défis que doivent relever les pouvoirs publics des économies émergentes pour améliorer la distribution des revenus et réduire les inégalités tout en favorisant des emplois plus nombreux et meilleurs.

Encadré 0.2. Exemples de programmes de transferts en espèces : Bolsa Família, Dibao et Child Support Grant Dibao (Chine)

Mis en place à titre expérimental à Shanghai en1993, le programme Dibao a été étendu à l’ensemble des villes chinoises en1997 et mis en œuvre progressivement dans l’ensemble du pays jusqu’en2007.

L’objectif initial était d’apporter un soutien aux travailleurs qui avaient été licenciés des entreprises d’État dans le cadre du processus de restructuration et d’éviter les troubles sociaux liés à la transformation économique rapide du pays (Chen et Barriento, 2006).

Le montant de la prestation est obtenu en multipliant la taille du ménage par l’écart entre le revenu par tête du ménage et un niveau de vie minimum déterminé localement. Le Dibao est financé par l’administration centrale et les municipalités dont la part varie en fonction de leur capacité financière (dans les riches régions côtières, les municipalités, prennent en charge la plupart des dépenses, tandis que les municipalités pauvres de l’ouest du pays, par exemple, n’assument pratiquement aucune dépense ; Solinger, 2008). Bien que l’augmentation très rapide de la couverture soit un acquis important, une majorité de ménages pauvres n’est toujours pas couverte. Les migrants des zones rurales en sont explicitement exclus en raison du système de permis de résidence (hukou rural ou urbain).

Les contraintes budgétaires tendent à abaisser le montant utilisé par les administrations locales pour déterminer les seuils de pauvreté locaux, ce qui implique que les droits à prestations ne reflètent pas de manière adéquate l’étendue de l’écart de pauvreté. Qui plus est, bien souvent, la prestation ne couvre pas les besoins élémentaires des pauvres.

Les méthodes intrusives utilisées pour déterminer les droits à prestations et administrer les prestations peuvent également dissuader certaines personnes d’en faire la demande (Cai etal., 2010). Par exemple, les parents et les voisins des candidats aux prestations sont interrogés. Les résultats de l’enquête sont affichés dans un lieu public de manière à solliciter le point de vue sur le droit aux prestations non seulement des voisins immédiats, mais de toute personne connaissant la situation réelle de la famille candidate et à même d’observer leurs allées et venues quotidiennes (Solinger, 2008).

Certains aspects du programme Dibao peuvent également être perçus comme empêchant les bénéficiaires de sortir de la pauvreté. Dans certaines villes, les ménages qui ont un ordinateur ou une voiture, utilisent un téléphone cellulaire et inscrivent leurs enfants dans des établissements d’enseignement spéciaux n’ont pas droit aux prestations (Solinger, 2008). En outre, la prestation est calculée de manière à être réduite en cas d’augmentation des revenus, ce qui entraîne dans les faits un taux marginal d’imposition des revenus du travail de 100%.

Le programme brésilien Bolsa Família, mis en place en2003, regroupe quatre dispositifs fédéraux existants pour :

- encourager la scolarisation,

- améliorer la nutrition des mères,

- lutter contre le travail des enfants

- et subventionner le prix du gaz de cuisine.

Le programme cible deux groupes de population sur la base de leurs revenus autodéclarés : les pauvres et les très pauvres. Ces deux groupes ont droit à des paiements mensuels pour chaque enfant de moins de 15ans jusqu’à un maximum de cinq. Les très pauvres perçoivent également une prestation uniforme indépendante de la composition du ménage. Le versement de la prestation est conditionné à la scolarisation des enfants, à l’obligation de visites médicales et au suivi médical des femmes enceintes. Ces conditions visent effectivement à encourager les bénéficiaires à faire usage de leurs droits à la gratuité de l’enseignement et des soins ; et leur non-respect est perçu comme une forme d’obstacle à l’accès au service plutôt que comme un refus de s’y conformer (Fizbein et Schady, 2009).

En conséquence, le versement de la prestation n’est suspendu provisoirement qu’après trois avertissements et, éventuellement, la visite d’un travailleur social.

Globalement on s’accorde à considérer que le programme a réussi à :

- augmenter la consommation,

- à réduire la pauvreté

- et à développer la scolarisation des enfants pauvres

Toutefois, la méthode de sélection a été souvent critiquée car elle peut conduire à certaines distorsions comme le népotisme et la déperdition. Hall (2008) rapporte des cas de clientélisme et de manipulation à des fins électoralistes. Par ailleurs, le programme est sujet à un nombre relativement élevé d’erreurs d’attribution en comparaison, par exemple, avec le programme d’inclusion mexicain.

Des éléments semblent également indiquer que le programme Bolsa Família influence l’affectation des dépenses à la nourriture, aux fournitures scolaires et à l’habillement des enfants (Soares etal., 2007). Si le programme est parvenu à accroître les taux de scolarisation, un plus grand nombre d’enfants ont des difficultés à l’école. L’impact du programme sur la vaccination des enfants n’a pas non plus été significatif.

L’utilisation de la CSG a progressé de manière spectaculaire entre 2000 et2010. À cette date, elle était versée tous les mois à des personnes s’occupant au total de 10.4millions d’enfants, représentant environ 68% de l’ensemble des bénéficiaires de la sécurité sociale (OCDE-OIT, 2011f). On a également observé une forte augmentation du nombre des bénéficiaires de la CSG parmi les mères de nouveau-nés qui ont commencé à demander de plus en plus à en bénéficier à mesure que le programme prenait de l’ampleur et que les ménages les plus pauvres avaient connaissance de son existence. L’accroissement de la couverture reflète, dans une large mesure, une plus grande confiance dans le système.

Toutefois, cette progression résulte pour l’essentiel de l’extension progressive de l’âge d’octroi au fil des ans. Initialement, les enfants n’avaient accès à la CSG que jusqu’à leur septième anniversaire. L’âge plafond de l’enfant a été relevé progressivement, en trois temps :

- Àpartir d’avril 2005, il a été porté à 14ans, c’est-à-dire que les enfants devaient avoir moins de 14 ans pour toucher l’allocation.

- Entre juin 2005 et juillet 2006, on a enregistré plus de 1500000 nouveaux bénéficiaires de la CSG, après quoi le rythme s’est ralenti.

- Enfin, en2008, les conditions d’octroi ont été à nouveau modifiées dans le but d’arriver progressivement à l’horizon2012 à une couverture de tous les enfants jusqu’à l’âge de 18ans. On estime que ce relèvement en trois temps de l’âge plafond devrait encore accroître le nombre des bénéficiaires de quelque 2.4millions à l’horizon2013. Des discussions récentes ont porté sur l’assujettissement du versement de la CSG à la scolarisation des enfants et à leur assiduité.




Maj :26/07/2013
Auteur : ficemea

Auteur : marc geneve