En signant des traités internationaux protégeant les droits de l’homme, chaque État s’engage individuellement à prendre des mesures afin de garantir à chacun de ses citoyens la mise en œuvre des droits protégés par ces traités. L’Organisation des Nations Unies dispose d’un système complexe de promotion et de protection des droits de l’homme à vocation universelle, par lequel les gouvernements sont régulièrement examinés concernant la mise en œuvre de ces droits.
LE CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME
Le principal organe des Nations Unies œuvrant à la promotion et la protection des droits de l’homme est le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.
C’est un organe de l’Assemblée Générale des Nations Unies, basé à Genève et composé de délégations d’État. Le Conseil définit les grandes orientations en matière de politique, examine les problèmes qui se posent en matière de droits de l’homme, élabore de nouvelles normes internationales et en surveille l’application partout dans le monde. Le Conseil offre également aux Etats et aux organisations internationales une tribune pour exprimer leurs préoccupations au sujet des droits de l’homme.
De plus, il est habilité à évaluer la situation des droits de l’homme partout dans le monde, et à étudier les éléments d’informations présentés par les Etats, les organisations non-gouvernementales, et d’autres sources. Ceci passe par différents mécanismes :
- les « Procédures Spéciales », par lesquelles des experts indépendants en matière de droits de l’homme émettent des recommandations sur les droits de l’homme dans une perspective thématique ou dans le cadre d’un pays en particulier. Le système des Procédures Spéciales est un élément central du système des Nations Unies et couvrent tous les droits humains, qu’ils soient civils, économiques, culturels, politiques ou sociaux. A ce jour, il existe 41 mandats thématiques (par exemple sur les détentions arbitraires, sur le droits des peuples indigènes, les droits humains des migrants…) et 14 mandats se concentrant sur un pays (par exemple sur la situation des droits de l’homme en Côte d’Ivoire, au Cambodge, en Haïti…).
- Le Conseil dispose également d’une procédure de plainte, par laquelle tout individu, groupe ou organisation non-gouvernementale estimant être victime d’une violation des droits de l’homme ou ayant une connaissance directe et sûre d’une violation des droits de l’homme peut soumettre une plainte au Conseil.
- Le Conseil dispose également d’une procédure unique : celle de l’Examen Périodique Universel. Il consiste à passer en revue les réalisations de l’ensemble des États membres de l’ONU dans le domaine des droits de l’homme. Il fournit à chaque État l’opportunité de présenter les mesures qu’il a prises pour améliorer la situation des droits de l’homme sur son territoire et remplir ses obligations en la matière. L’objectif ultime est d’améliorer la situation des droits de l’homme dans tous les pays et de traiter les violations de ceux-ci, où qu’elles se produisent.
Par ce mécanisme, la situation des droits de l’homme de tous les pays membres de l’ONU est examinée tous les quatre ans et demi. 42 États sont examinés chaque année, lors de trois sessions de 14 pays chacune. Chaque gouvernement doit préparer un rapport national qui sera examiné par le Conseil. Les organisations de la société civile sont autorisées à soumettre des rapports qui seront également examinés par le Conseil. A l’issue de chaque session, le Conseil émet des recommandations à l’État examiné qu’il devra mettre en œuvre avant l’examen suivant, quatre ans et demi plus tard.
LES ORGANES DE TRAITÉ DES NATIONS UNIES
La procédure devant les organes de traité
A côté du Conseil et de ses mécanismes, il existe plusieurs organes de traité des Nations Unies, qui sont composés d’experts indépendants. Chaque organe surveille la mise en œuvre d’un traité spécifique garantissant des droits humains.
Examen de Rapports périodiques et de Rapports Parallèles
En signant un traité, chaque État assume l’obligation légale de mettre en œuvre les droits reconnus par ce traité. Mais ce n’est pas tout : l’État en question a également l’obligation de soumettre des rapports périodiques à l’organe de traité compétent sur la manière dont ces droits sont mis en œuvre.
En plus du rapport soumis par l’État partie, les organes de traité peuvent recevoir des informations sur la situation des droits de l’homme dans un pays par d’autres sources, que ce soient des institutions nationales pour les droits de l’homme, des organisations de la société civile, des entités nationales ou internationales des Nations Unies, d’autres organisations intergouvernementales, ou des groupes professionnels et des institutions académiques. Ces rapports sont appelés des rapports parallèles ou rapports alternatifs, et peuvent contenir une analyse factuelle ou légale.
A la lumière des informations disponibles, l’organe de traité compétent examine le ou les rapports en présence de la délégation de l’État partie. A la suite de ce dialogue, le Comité publie ses préoccupations et recommandations sous la forme « d’observations générales ».
Les individus peuvent soumettre des plaintes sur la scène internationale concernant la violation de leurs droits. Il existe trois procédures pour soumettre une plainte devant un des Comités :
- Plaintes individuelles
Certains Comités peuvent, sous certaines conditions, recevoir des plaintes individuelles. Tout individu qui estime que ses droits garantis par un traité ont été violés par un État partie à ce traité peut saisir le Comité compétent, seulement si l’État a reconnu la compétence de ce comité de recevoir une telle plainte et que les recours nationaux ont été épuisés.
- Plaintes interétatiques
Plusieurs Comités disposent d’une procédure de plainte interétatique par laquelle un État partie à une Convention peut soumettre une plainte à l’organe de traité compétent concernant la violation alléguée d’un traité par un autre État partie.
- Enquêtes
Plusieurs Comités peuvent, sous certaines conditions, initier des procédures d’enquêtes s’ils reçoivent des informations contenant des indications fondées de violations graves, sérieuses, ou systématiques de droits garantis par un traité dans un État partie.
Les différents organes de traité
Il existe 10 organes de traité composés d’experts indépendants disposant de compétences reconnues en droits de l’homme, qui sont nommés et élus pour 4 ans renouvelables par les États parties.
Ces 10 organes de traité sont les suivants :
- Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a été crée par le Conseil économique et social afin de surveiller l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité évalue les progrès de chaque pays sur la mise en œuvre des droits consacrés par le Pacte par l’examen de rapports périodiques soumis par les gouvernements. En plus de la procédure de rapport, le Protocole Facultatif du Pacte a également crée un mécanisme de plainte individuelle. Le Comité peut également, dans certaines circonstances, mener des enquêtes sur des violations graves ou systématiques de n’importe quels droits économiques, sociaux et culturels protégés par le Pacte, et considérer des plaintes interétatiques.
- Le Comité des droits de l’homme est l’organe d’experts indépendants surveillant la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques par les États parties. Tout comme le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, cette surveillance passe par l’examen de rapports périodiques soumis par les gouvernements, ou de rapports parallèles. Le Comité peut également examiner des plaintes individuelles conformément au Protocole Additionnel du traité.
- Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale est un organe d’experts indépendants qui surveille la mise en œuvre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le Comité examine les rapports périodiques soumis par les gouvernements, et dispose également de procédures d’alerte rapide (qui ont pour objectif d’éviter que des situations existantes escaladent en conflit) et d’intervention d’urgence (qui répondent à des problèmes requérant l’attention immédiate du Comité pour prévenir ou limiter une future violation des droits protégés par la Convention). Le Comité peut également considérer des plaintes interétatiques, ainsi que des plaintes individuelles.
- Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes est un organe composé de 23 experts indépendants qui surveille la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Tout comme les Comités précédents, le Comité examine les rapports soumis par les gouvernements. Conformément à son Protocole Facultatif, le Comité a également mandat pour recevoir des communications de groupes ou d’individus qui estiment que leurs droits sous la Convention ont été violés, et pour mener des enquêtes sur des situations de violations graves ou systématiques de droits des femmes.
- Le Comité des droits de l’enfant est un organe composé de 18 experts indépendants. Il surveille la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant par les États parties. Le Comité surveille également l’application du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. En 2011, l’Assemblée Générale des Nations Unies a approuvé un troisième Protocole Facultatif sur une procédure de communication, qui autorise un enfant à soumettre une plainte concernant la violation d’un de ses droits sous la Convention et ses deux Protocoles Facultatifs. Le Comité peut également étudier des plaintes interétatiques. Tous les États doivent soumettre des rapports périodiques sur la manière dont les droits des enfants sont mis en œuvre. Le Comité a également la possibilité de mener des enquêtes sur des allégations de violations graves ou systématiques des droits protégés par la Convention et ses protocoles.
- Le Comité contre la torture est un organe composé de 10 experts indépendants qui surveille l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants par les États parties par l’examen de rapports périodiques. Le Comité contre la torture peut également considérer des plaintes individuelles ou des communications par des individus estimant que leurs droits ont été violés, mener des enquêtes et examiner des plaintes interétatiques.
- Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille est un organe composé de 10 experts indépendants surveillant l’application de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. La fonction du Comité est de contrôler les rapports présentés par les États parties. Le Comité est également compétent pour recevoir et juger les plaintes individuelles d’après l’article 77 de la Convention, mais cette procédure entrera en vigueur dès que 10 États parties l’auront acceptée.
- Le Comité des disparitions forcées est un organe d’experts indépendants qui surveille la mise en œuvre de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées par les États parties. Le Comité examine les rapports périodiques soumis par les gouvernements ainsi que les Rapports Parallèles. Chaque État partie à la Convention peut reconnaître au Comité la compétence de recevoir des plaintes individuelles de la part d’individus estimant qu’un de leurs droits protégés par la Convention a été violé. Le Comité peut également considérer des plaintes interétatiques.
- Le Comité des droits des personnes handicapées est un organe composé d’experts indépendant qui surveille l’application de la Convention relative au droit des personnes handicapées. Chaque État partie doit présenter au Comité un rapport détaillé sur les mesures qu’il a prises pour s’acquitter des ses obligations en vertu de la Convention. Le Protocole facultatif à la présente Convention donne compétence au Comité pour recevoir et examiner des communications émanant d’individus relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d’une violation, par cet État partie, de l’un quelconque des droits énoncés dans la Convention. Il peut également mener des enquêtes.
Lauren Miller, Etudiante en Master de Global Governance Studies à l’Ecole de Droit de Sciences Po Paris.