Le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies a adopté par consensus jeudi dernier une nouvelle résolution
sur le droit à l’éducation et a ainsi donné une reconnaissance étatique
historique des Principes d’Abidjan sur le droit à l’éducation. Il s’agit
de la première reconnaissance officielle à ce jour par les États de ce
nouvel instrument, le Conseil des droits de l’Homme étant composé de 47 États élus par leurs pairs.
Les Principes d’Abidjan ont été adoptés en février 2019 par plus de 50 experts
du droit à l’éducation, à l’issue d’un processus de consultation de
trois ans avec les décideurs, les communautés et les praticiens. Ce
texte important détaille le cadre juridique des droits de l’Homme en
vigueur en ce qui concerne les obligations des États en matière
d’éducation publique et de réglementation de la participation du secteur
privé à l’éducation. Il est en train de rapidement s’imposer comme l’un
des instruments de référence sur le droit à l’éducation, en particulier
dans le contexte de la privatisation et de la marchandisation
croissantes de l’éducation à travers le monde.
« La reconnaissance par le Conseil des droits de l’Homme des
Principes d’Abidjan est véritablement historique. Cela reflète la
rigueur du processus d’élaboration de ces Principes et la demande des
États de disposer d’orientations plus précises et d’un cadre de droits
cohérent pour réfléchir à leurs politiques d’éducation », a déclaré Delphine Dorsi, de l’Initiative pour le droit à l’éducation.
La résolution du Conseil des droits de l’Homme a été adoptée par
consensus sans vote et a été parrainée à ce jour par 75 États de toutes
les régions du monde. Ce large soutien reflète les nombreuses déclarations positives
concernant les Principes d’Abidjan faites par les États lors du dialogue
avec la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur le droit à
l’éducation, qui s’est déroulé à Genève il y a deux semaines. Un certain
nombre d’États de tous les continents, notamment la Côte d’Ivoire, où
ont été adoptés les Principes, ont appuyé l’inclusion des Principes
d’Abidjan dans la résolution.
« Je suis ravi que les États et les institutions africaines au plus
haut niveau jouent un rôle moteur pour répondre aux menaces croissantes
contre le droit à l’éducation, en particulier la croissance non
réglementée du secteur privé. Il s’agit toutefois d’un phénomène mondial
et il est important que des normes mondiales soient établies, à
l’instar de la résolution Conseil des droits de l’Homme », a déclaré Paulin Junior Kouamé, du Réseau ivoirien pour la promotion de l’éducation pour tous.
Cette résolution renforce l’élan croissant en faveur des Principes d’Abidjan. En mai, la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples avait adopté une résolution
reconnaissant les Principes d’Abidjan comme des lignes directrices
permettant aux États de s’acquitter de leurs obligations en matière de
droits de l’Homme. En juin, le Partenariat mondial pour l’éducation, le
principal fonds multilatéral mondial pour l’éducation, avait également
pris note des Principes d’Abidjan dans sa nouvelle stratégie d’engagement du secteur privé. La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur le droit à l’éducation a de même consacré son rapport de juin 2019 à la mise en œuvre de l’Objectif de développement durable (ODD) 4 sur l’éducation en conformité aux Principes d’Abidjan.
Salima Namusobya, de l’Initiative for Social and Economic Rights, a commenté : « La
résolution du Conseil des droits de l’Homme envoie un message puissant,
alors que les États se réunissent actuellement à New York pour examiner
la mise en œuvre de l’ODD 4. Nous sommes encore loin d’atteindre les
objectifs de l’ODD 4, notamment de garantir 12 ans d’éducation gratuite
et de qualité pour tous. Le cadre des droits de l’Homme offre non
seulement un ensemble de normes juridiquement contraignantes, mais
également des outils qui permettront aux États de financer et de
développer des systèmes d’éducation publique de qualité et de mettre en
place une réglementation adéquate des acteurs privés. »
Dans une déclaration
publiée aujourd’hui, les neuf membres du comité qui ont rédigé les
principes d’Abidjan ont également salué la résolution décisive du
Conseil des droits de l’Homme.
« Il existe désormais une dynamique mondiale pour placer le droit à
l’éducation au cœur des politiques éducatives. Après des années de
tentatives infructueuses visant à améliorer la fourniture de l’éducation
en privatisant ou en marchandisant des systèmes éducatifs, les États et
les acteurs de l’éducation réalisent que la création d’un marché de
l’éducation anarchique ne permet pas de respecter le droit à
l’éducation, et qu’il est nécessaire de mettre en place des normes et
des critères si l’on souhaite sérieusement développer des systèmes
éducatifs équitables », a ajouté Sylvain Aubry, de la Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights.
Comme les années précédentes, la résolution du Conseil des droits de
l’Homme reconnaît également « l’importance primordiale que revêt
l’investissement dans l’enseignement public » et exhorte les États,
entre autres recommandations, « à réglementer et à superviser les
activités des prestataires de services d’éducation », afin de corriger «
toute incidence négative de la marchandisation de l’éducation » et de
renforcer « l’accès des victimes de violations du droit à l’éducation à
des voies de recours et à des réparations appropriées ».
Documents
- Résolution du Conseil des droits de l’Homme des Nations unies sur le droit à l’éducation du 11 juillet 2019 : http://bit.ly/2XTXnWA
- Principes d’Abidjan sur le droit à l’éducation : http://bit.ly/2XZhUca
- Rapport de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur le droit à l’éducation sur l’ODD 4 et les principes d’Abidjan : http://bit.ly/2XjYJc
- Réaction des membres du comité de rédaction : http://bit.ly/2l7HxFQ